Royel Otis (Paris, 20 novembre 2024) |
Furie indie-pop hier soir au Trianon : les nouveaux rois du genre viennent de l’autre bout du monde et répondent au doux nom de Royel Otis – leurs prénoms respectifs ainsi collés. Phénomène fulgurant : il y a un an de ça les deux potes de Sydney se produisaient au Supersonic (épique parait-il mais gratuit) mais depuis le buzz de leurs jeunes et nombreux hits à guitares a tellement contaminé la toile que le duo saute toutes les classes d’un coup : prévus initialement au Trabendo (700 places), le gig est finalement déplacé au Trianon (1100 places) devant la cohue en billetterie, et complet depuis des mois… La France est sous le charme.
Comment ne pas l’être ? La recette Royel Otis est simple en apparence (rengaines pop entêtantes sur guitares carillonnantes) mais perfectionnée à un degré étonnant pour deux types approchant à peine les 25 ans, et un seul album long (Pratts & Pain, sorti en début d’année). Conséquence : folie dans la fosse dès les premières notes et jusqu’à la dernière. Tous les refrains seront repris en chœur ce soir, dans une joyeuseté un peu sauvage mais totalement bon enfant… Le public est de fait très jeune, plutôt féminin, un peu épris d’Otis pour certain.e.s et ne voudrait voir personne d’autre sur Terre semble-t-il. Que les Beatles et Taylor Swift se rhabillent, leur place est prise.
Premiers cris dès l'entrée en scène donc, avec le traditionnel bond en avant de Royel (Maddell), qui déboule sur l'estrade de façon paradoxale, comme un boulet mais toujours caché (effacé?) derrière ses longs cheveux blonds à la Kurt Cobain ramenés sur le devant tels un mur entre lui et le monde... Souvenirs de grunge. On distinguera à peine ses traits ce soir, à l'exact inverse de son compère Otis (Pavlovic), s'offrant en toute transparence avec ses cheveux courts et sa petite voix angélique... Attitudes divergentes mais accord musical plein et entier cela dit, pas de souci. Les deux composent et font tout ensemble, seulement accompagnés de deux musicos en tournée (batterie et synthé).
Début du live, et premières impressions vaguement mitigées. Si l’intro nous remplit de plaisir ("Heading for the Door", bijou jangle-pop à guitare mélodieuse et stridente), la suite immédiate nous laisse un peu indécis, la faute à une balance sonore un peu trop "rock" peut-être – guitares très fortes, voix d’Otis un peu couverte, mélodies moins nettes. Le doute se dissipera heureusement. Trop de hits, trop d’énergie, trop de montées euphoriques partagées avec le public. "Foam" et son refrain né pour être fredonné est le premier signal de ralliement. « Slow down, and keep my name out your mouth… I could burn your love to the ground… » La guitare de Royel divague, la voix d’Otis berce, c’est mélancolique et enjoué à la fois, c’est parfait. Derrière nous la pression continue de monter, et se diffuse jusqu’aux balcons… Ça chante et ça danse, comme dans une grande discothèque pop-friendly. Sloooow down... Non, pas ce soir. L'atmosphère est belle à voir, à tel point que Royel et Otis auront droit à une standing ovation avant même la fin. « Thank you, it’s a dream come true for us... » livre Royel en laissant entrevoir un œil ravi de sa tignasse, presque ému, et ça n'a même pas l'air exagéré. Il faut dire aussi que les deux ont du annuler la suite de leur tournée triomphale aux US, la faute à de graves problèmes de famille côté Royel justement… Tout l’amour du monde était pour lui ce soir.
La fin du set est une longue euphorie donc. "Fried Rice", "Sofa King", "Oysters In My Pocket", Otis et Royel enchainent les tubes et le parquet gondole comme jamais, frappé et martelé des pieds par un public XXL qui renvoie l’énergie de la scène au centuple. Noyé dans tout cela leur reprise épique de "Murder on the dancefloor" (Sophie Ellis-Bextor) passe presque inaperçue… Un sommet parmi d’autres. Otis alterne entre guitare et micro seul, Royel joue le guitar hero sans en faire trop, tous deux affublés de leur traditionnel jean baggy et t-shirt rock. Ces gars-là ressemblent à votre ado skater de 16 ans mais jouent des vétérans de la pop. Que dire d’autre… Le travail compte évidemment mais la classe naturelle doit jouer un peu aussi.
Combien de « we love you Otis ! » ce soir au fait ? Quelques-uns. Et Otis est un gentil garçon, alors parfois il répond d’un petit cœur avec les doigts. C’est con mais mignon.
Fin du set, puis rappel… Votre blogueur préféré, qui confondait allégrement les titres, pense que la messe est dite en termes de tubes mais n’a rien compris car reste encore à venir "Kool Aid", peut-être le plus grand de tous. « But I don't think we can take much more, but i don't think we can't take much more... » Folie sur ce refrain. Les stroboscopes noient le Trianon dans les flashs de rose, tout est brillant et remuant. Padam padam sur le sol. « You keep us waiting… » chantonne Otis et c’est un peu vrai, factuellement, mais personne ne lui en veut. Délivrance totale, collective. C'est la musique. Et avant cela autre moment d’émotion, plus rentrée, avec leur jolie petite reprise de « Linger », ballade culte des Cranberries. Do you have to, do you have to... Reprise en chœur, bien évidemment.
La soirée s’achèvera sur une standing ovation, la seconde, et un salut final comme au théâtre. Mérité. Retenez bien ces deux noms : Royel, Otis.
Le ciel est leur limite.
Plus de vidéos sur ma chaîne YouTube
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire