Suivre sur les réseaux sociaux

dimanche 15 décembre 2024

Vampire Weekend à l'Arena : Friday Night Lights

 

Photo personnelle

 

A l'Adidas Arena, le 13 décembre 2024

Cadeau d’anniversaire parfait cette année : revoir Vampire Weekend des siècles après la première et dernière fois, en 2009 : souvenirs de Rock en Seine, d’un groupe à peine connu de moi à l’époque (ou même pas du tout), et la joie de les voir jouer en fin d’après-midi sur la grande prairie de Saint-Cloud leur pop d’étudiants joyeuse et rythmée, pas encore en haut de l’affiche mais déjà impeccables. Ezra Koenig, aperçu de loin sur l’écran, était jeune et classiquement beau, college boy typique slash gendre idéal de la Côte Est très friquée mais au moins lettrée, et ses comparses glabres ou rasés de près, discrets. Chemises à carreau bien repassées. C’était l’esprit "Cap Cod", sur la lancée de leur formidable premier album et de ses 5 ou 6 hits mignonissimes (Vampire Weekend). C’était bien.

15 ans plus tard quelques petites choses ont changé (un membre parti, un autre s’étant laissé pousser une abondante barbe de hipster) mais Ezra Koenig non : à 40 ans entamés l’homme a toujours l’air d’en avoir 22 avec ses petites mèches noires et son visage poupin, vision antinomique avec l’œuvre déjà foisonnante du bonhomme chez VW (5 albums dont 4 quasi parfaits, notamment le dernier très bien noté ici). Un des meilleurs songwriters pop/rock contemporains de son pays, très simplement. L’homme anime aussi un podcast à succès (dix saisons), et a dernièrement été vu à la cérémonie de clôture des Jeux Olympiques avec un certain Thomas Mars… Stéréotype de l’homme agaçant.

Lointain est le temps où Vampire Weekend tournait dans des petites salles indés donc, s’il a jamais existé. C’est l’Adidas Arena et ses 8000 places qui les accueillait ce vendredi soir, seule date française d’une tournée internationale bien rodée. Pas forcément mon type de salle, mais le format a aussi ses avantages : 2h30 de concert au total, soit le double de la plupart de nos petits concerts indés habituels. C’est le prix du billet.

Rayon scénographie pas de folie Swiftienne, mais une jolie entrée en matière : trois premiers morceaux joués intimement à trois (le groupe en tant que tel, débarqués sur scène l’un après l’autre) dont le très punchy "Holiday" (second album, Contra). Chris Baio s’amuse déjà comme un petit fou à la basse, les deux jambes presque constamment fléchies et twistant au gré du rythme, tandis qu’Ezra Koenig fait comme d'habitude dans le sobre mais nous régale de ses petits riffs aigus si brefs et malins et de sa voix si délicate (charisme à 100/100)... C’est pro et enjoué.

Et puis au milieu de "Ice Cream Piano", tombée du rideau… Cinq amis sont derrière, tous de blanc vêtus, et prêts à propulser Vampire Weekend dans des territoires encore plus colorés et excitants musicalement : deux synthés, un violon, une deuxième batterie plus percussions, une deuxième guitare qui gronde pour les morceaux les plus noisy de leur dernier LP, tout est maintenant là pour offrir à la salle le show XXL promis dans le forfait. C’est attendu, mais on ne boude pas. "Classical" nous prend rapidement par les sentiments, avec son joli refrain tout innocent entrecoupé de petites dissonances sonores. « Untrue, unkind, and unnatural… » C’est charmant. Koenig se recule régulièrement pour laisser s'exprimer le petit orchestre autour de lui, réglé comme un ensemble de la Philharmonie. On observe les deux batteurs se relayer aux timbales et caisses diverses l’œil un peu gourmand, pris dans le rythme. Vampire Weekend est un plaisir musical assez primaire au fond.

Quelques hits encore ("Step" et "This Life" notamment, très célébré), puis arrive le moment qu’on craignait un peu : petite séquence « jam » autour de 3 morceaux de leur quatrième LP, pas notre préféré. Longues improvisations instrumentales en mode répétition du mercredi soir, qui ravit les musiciens espère-t-on mais calme un peu la salle. On attend que ça passe, sans grande rancune. Le show est encore long.

La rupture de style arrive bientôt : à peine fini l’intermède jam c’est le duo "Campus" / "Oxford Comma" (premier LP) qui est offert à nos douces oreilles de pop fans nostalgiques des années perdues… La main sur sa guitare carillonnante Ezra déclame quelques-uns de ses plus beaux vers. « In the afternoon, you're out on the stone and grass… and I'm sleeping on the balcony after class » Tout ça date un peu mais c’est encore frais comme un bon soda servi l’été. On s’imagine aisément sur le campus de Columbia, lambinant le tête posée sur la pelouse après un cours d’histoire de l’art un peu longuet. Vampire Weekend sert aussi à cela : nous rendre toutes ces années jamais vraiment vécues sauf dans un parfait couplet d’indie-pop. L’espoir demeure.

Le reste du live est tout aussi pro (nouveau duo "A-Punk" / "Cousins", bougeotte garantie), entrecoupé de quelques moments plus gracieux : les lumières s’éteignent sur "Capricorn" et "Mary Boone", tandis que les flashs des smartphones s’activent, ersatz des briquets d’antan. Instant sentiments. « Too old for dyin' young, too young to live alone… Sifting through centuries, for moments of your own » Koenig n’a qu’à se baisser pour ramasser les sourires émus. Le ludique l’emporte sur d’autres titres, dont le bondissant "Harmony Hall" en avant-dernière place. Koenig et Baio font quelques pas de danse ensemble à la guitare, pris dans le groove. C’est varié, c’est frais. Longue version de l’élégiaque "Hope" pour finir, dernière track de leur dernier album : VW étire le temps et laisse chaque musicien sortir l’un après l’autre, dans une belle chorégraphie sonore remplie de synthés et percussions, et de guitares plus denses qu’auparavant. Le Vampire Weekend nouveau est mi symphonique mi noisy, et toujours innovant. Koenig et Baio sont les deux derniers sur scène, en symétrie de l’intro. Derniers petits riffs de Baio et écran noir.

Bonus tracks : pour le rappel VW nous offre leur dernière trouvaille, une séquence reprises sur propositions de la salle. Le dispositif est déjà testé et fonctionne plutôt bien malgré nos doutes préalables, avec notamment d’étonnantes reprises de Plastic Bertrand et de la VO de "Cette année-là" de qui vous savez (The Four Seasons – "December, 1963") mais aussi de jolies petites versions de "Common People" de Pulp ou "Born To Run" du Boss. Les titres s’enchainent rapidement, rarement joués plus d’une minute faute d’habitude. Pourquoi pas. Un type est apparemment venu du New Jersey pour l’occase et aimerait du VW quand même… On lui offre quelques notes de "The Kids Don’t Stand A Chance". C'est sport.

Dernière surprise, une version endiablée de "Walcott", autre hymne college-pop sans âge de leur premier album. La salle est ravie, et nous aussi. Les bras se lèvent en cadence pour cette dernière offrande et Ezra Koening et compagnie nous quittent pour de bon cette fois… Il est 23h30 et le weekend commence à peine.

 

Plus de vidéos sur ma chaine YouTube 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire