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jeudi 20 avril 2023

Synth-pop, une anthologie

Johnny Marr et Bernard Sumner, période Electronic (photo Brian Rasic)

La synth-pop c’est la vie. Partant de ce constat implacable, il m’apparaissait nécessaire d’offrir aux générations futures écrasées par le réchauffement climatique et le poids de la dette quelques preuves démontrant qu’une époque lointaine exista où l’on pouvait conjuguer joie de vivre et grande qualité musicale – les années 80 évidemment, mais pas seulement. Au menu aujourd’hui donc : 12 titres de synth-pop légers et enjoués (au moins en apparence) et surtout (relativement) peu connus, histoire de servir à quelque chose tout de même.

La playlist Spotify est DISPO ICI.

Nena – Nur Geträumt

Nulle playlist synth-pop possible sans passer par l’Allemagne bien sûr, ce genre propre et géométrique devant beaucoup aux glorieux découvreurs de Kraftwerk. Ici Nena, la Kim Wilde allemande des eighties, surtout connue pour son ultra-hit "99 Luftballons", compagnon parfait pour soirées d’anniversaire ou fins de mariage. Chanson extraite du même album (le self-titled Nena), tout aussi sautillante. Aucune idée de ce que cela raconte en revanche.


Alphaville – Big In Japan

Restons outre-Rhin avec le groupe Alphaville, autre géant des eighties allemandes. Un des hits de leur grand album Forever Young, dont la chanson du même nom est un peu plus célèbre – à tort selon moi. Irrésistiblement dansante, ce titre n’a pourtant rien de très gai si l’on se penche sur les lyrics (en anglais), puisque Marian Gold fait ici référence à la vie autour de la station de métro Berlin-Zoo dans le Berlin-Ouest des années 70, tristement célèbre pour recueillir toute une jeunesse désœuvrée tombée dans l’héroïne et la prostitution enfantine – et rêvant éventuellement à d’autres lieux, d’où le « célèbre au Japon ». Une époque bien racontée dans le fameux témoignage Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée…, grand classique de la littérature allemande.


Premier Métro – La nuit

Un jeune groupe français, et parisien de surcroît, comme son nom et son style général l’indique assez clairement. Une chanson tout à fait primaire et délicieuse, avec un petit solo de synthé kitschissime en guise de refrain rappelant les meilleurs moments de d’Orchestral Manœuvres in the Dark.


Electronic – Disappointed

Electronic est un très grand side-project, né de la rencontre entre Bernard Sumner (New Order) et Johnny Marr (The Smiths), tous deux désireux de se libérer des contraintes relationnelles et stylistiques de leurs groupes respectifs et de faire de la petite pop catchy teintée d’électro et de funk qui touche immédiatement au cœur. Ils sont ici rejoints par Neil Tennant des Pet Shop Boys qui assure les vocals de cette chanson incommensurablement douce et mélancolique. Disappointed, once more, disillusioned, encore…


The Other Two – Tasty Fish

Un autre side-project de New Order, avec Stephen Morris et Gillian Morris cette fois, tous deux membres du Fab Four mancunien et par ailleurs couple à la ville. Cette chanson sonnant très années 80 mais sortie en 1992 est l’occasion d’entendre (enfin) la voix de Gillian Morris, d’ordinaire cachée derrière son synthé chez New Order, dans l’ombre particulièrement portante de messieurs Sumner et Hook. « Synth queen » officieuse des réseaux sociaux et des jeunes artistes synth féminines des années 2010/20.


Tops – Colder & Closer

Dans la guerre musicale larvée entre Toronto (Broken Social Scene, Alvvays, Metric, Crystal Castles…) et Montréal (Arcade Fire, Stars, Godspeed You! Black Emperor…), les Canadiens (Montréalais) de Tops font plutôt dans la discrétion et ce n’est pas pour me déplaire. Extrait de leur dernier album en date (I Feel Alive, 2020), dont la chanson titre vaut également le détour.


Pet Shop Boys – Being Boring

Retour à l’Angleterre avec Neil Tennant et les rois de la synth-pop mainstream des Pet Shop Boys, duo fondé avec le claviériste et DJ Chris Lowe. Ce titre, première piste de l’album Behaviour, met un certain temps à démarrer mais atteint finalement tous ses objectifs, larges et douces nappes de synthé à l’appui. Magnifique refrain en forme de déclaration programmatique ('cause we were never being boring, we had too much time to find for ourselves...).


Cléa Vincent – Sexe d’un garçon

J’ai déjà parlé en longueur de cette artiste française intéressante. Extrait de son album le plus synth-friendly, le très évocateur Nuits sans sommeil (2019). Un titre gentiment engagé qui plus est.


Suicide – Surrender

Suicide, groupe proto-punk de la scène new-yorkaise des années 70, a commencé sa carrière de façon beaucoup chaotique sonorement parlant, partisans d'un électro-punk primaire sur boîte à rythmes aussi précurseur que psychotique. Après avoir été copiés, et un peu édulcorés, par environ 3500 groupes de synth-pop au tournant des années 80, Alan Vega et Martin Rev livrent à leur tour en 1988 cette merveille de ballade synthétique planante, chœurs soul en renfort (album A Way of Life).


Daniel Darc – Pars sans te retourner

Alan Vega était l’un des quelques héros punk de Daniel Darc, justement : las, il partira avant il, décédé brutalement en 2013 (Vega le suivra en 2016). En 1987 – date du titre – Daniel Darc a déjà rencontré Dieu mais perdu la majeure partie du swag acquise grâce au groupe Taxi Girl ("Cherchez le garçon"). Sous influence divine, son premier album solo dont est extrait ce titre, marque le début d’une longue période de disette existentielle où la drogue prendra malheureusement le pas sur la création musicale – son album suivant, le pourtant très défendable Nijinski, ne suivra qu’en 1994 et passera quasiment inaperçu (il n'est même plus distribué aujourd'hui). Une issue déjà un peu prévisible dans le playback ci-dessous, traits creusés et fatigue bien perceptibles sous le maquillage.


Alex Cameron – Candy May

Place à des sentiments plus joyeux avec Alex Cameron, le sympathique crooner pop néo-zélandais amusant élégamment la galerie depuis quelques années. Une chanson absolument imparable, qui comme toujours avec Alex Cameron met en scène des individus situés tout en bas de l’échelle sociale et du swag – et qui ici « vivent avec un remords profond de ce qu’ils font sur Internet »… Clip tourné à Vegas et offrant de grands moments de danse en solo.


New Order –Superheated

Pour finir, pas de play-list synth-pop possible sans un petit New Order en bonne et due forme bien entendu. N’étant pas capable de choisir une seule chanson de New Order sur des bases scientifiques sérieuses, j’ai décidé de m’arrêter sur la (presque*) dernière en date : "Superheated", le dernier titre de leur dernier album en date, Music Complete (2015), petite bombe électro-pop arrivée de nulle part après de longues années de silence et d’albums plus mineurs. Une ballade assez majestueuse chantée en duo avec Brandon Flowers – le chanteur des Killers, et fan de longue date du groupe** – et qui sonne étrangement comme un adieu avec ses lyrics très bittersweet. Things that I remember, that I wish I could change… Après ça on peut mourrir tranquille.


* Un single simple est sorti en 2020 ("Be A Rebel")

** Le nom The Killers est une allusion subliminale à un clip de New Order ("Crystal")

 

Playlist sur Spotify (extraits)


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