Contrairement à ce que laissait croire un excellent ouvrage, dont je parlerais peut-être un jour, grunge is not dead. Bullshit. La preuve : le mois de juin 2023 est déjà bien entamé et Bully, alias Alicia Boganno dans la vie civile, vient de sortir Lucky For You, un album de 31 minutes et 32 secondes qui donne furieusement envie de se défouler et d’hurler un bon coup sans raison – ou pour de bonnes raisons, c’est chacun selon.
Alicia Bognanno, alias Bully, n’est pas une personne facile : la preuve, Bully était à l’origine un groupe (comprendre : avec d’autres musiciens en plus d'Alicia), qui est finalement devenu un projet solo après qu’Alicia en ait eu assez de se coltiner les autres incapables – c’est ma version raccourcie. Depuis les choses ne vont pas trop mal. Un album déjà assez intéressant en 2020 (SUGAREGG, avec le très punchy "Where To Start"), puis cette petite chose brute et énervée cette année donc.
La grande qualité, je crois, de Bully – diagnostiquée bipolaire de niveau 2 – c’est de monter la voix sur de grosses guitares très lourdes et très distordues et d’expliquer sans douceur aucune à quel point cette vie et cette planète la fatigue et la frustre. Idée très bien posée d’entrée sur le très légèrement pop "All I Do" (« I am done, I am done »), puis encore plus clairement sur "Days Move Slow" (« and days move slow, I'm living in the same black hole »). Avant d’enfoncer le clou avec "Hard To Love" (piste 4 sur 10), une petite déflagration grunge pure de 2 minutes 33 absolument implacable et suffocante.
« Hard to love !!! » déclame là-dedans Bully avec punch et clarté, « I'm too hard to love !!! Way too hard to love !!! I'm too hard to love !!! » Cette honnêteté me plait.
La suite n’a pas tellement d’importance, à la limite. "Change Your Mind" convainc encore assez en piste 5, avant un ou deux titres un peu plus dispensables, peut-être, puis un duo avec l’excellente Soccer Mommy (nom civil : Sophia Allison, qui a la particularité d’être originaire de Nashville comme Bully), puis surtout un final en apothéose dont le titre ("All The Noise") résume bien toute la problématique, et dans lequel Bully nous parle parle cette fois de son rapport un peu compliqué à l’information et à l’Amérique – sur un mur de guitares absolument étouffant je précise. Extrait :
« But
I'm tired of waiting…
For change and debating…
I can't handle all this noise !!!
Save us from what it destroys !!!
There's no glory to be found !!!
America's been burning down !!! »
Amen !
En extrait : le clip de "Hard To Love", qui fait aussi mal aux yeux que le titre fait mal eux oreilles (mais c'est une douleur cathartique, donc douce).
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