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mercredi 3 juillet 2024

Alvvays Fan Fest : to London and back

 

Molly, Kerri et un smartphone (photo personnelle)

 

Londres, 26 juin. Paris, 2 juillet. Deux lieux, deux dates, même combat : Alvvays est en tournée européenne en ce début d’été 2024 et le cœur de tous les fans de Molly Rankin and co s’est accéléré soudain. "Archie, Marry Me" ? "Belinda Says" ? "Dreams Tonite" ? Oui toutes ces pépites pop uniques et intemporelles seront à nouveau jouées devant nous, pour nous. Seule inconnue véritable : quel t-shirt ultra cool portera Molly cette fois ? Mystère…

(L’an dernier à la même date : t-shirt noir The Damned)

Tout cela étant dit nos meilleurs amis canadiens ont fait un peu de chemin depuis l’an passé : un succès critique pour leur dernier album (Blue Rev) ne se démentant pas notamment, apparu sur la plupart des classements 2022 sérieux (n°1 chez Stereogum même) et leur valant en 2023 un honneur un peu mainstream et idiot mais tout de même significatif, j’ai nommé la nomination pour un Grammy ! Catégorie : meilleure chanson de musique alternative ("Belinda Says"). Gagné ils n’ont pas évidemment, mais qu’importe. Le tapis rouge fut foulé.

Conséquence logique : intérêt public et foules grandissantes. Une dynamique arithmétique particulièrement visible au Troxy (Londres), dans une île où la bonne musique pop et rock est reine : jauge à 3000 spectateurs dans cette salle quasi remplie semble-t-il, leur offrant sans doute quantitativement un des plus gros shows de leur carrière, sans compter leurs quelques apparitions en festival (dont la dernière à Glastonbury le week-end dernier, plutôt réussie).

Résultat un peu plus mitigé à Paris d’un point de vue chiffré (un gros millier de fans à l’Élysée Montmartre, pas totalement bondé), mais supérieur au millésime 2023 (Trabendo, 700 places) et peut-être plus appréciable d’un point de vue qualitatif surtout… En cause : la scène plus lointaine à Londres (barrières), une chaleur assez écrasante (distribution générale de verres d’eau) et une humeur d'ensemble assez grognonne ou pataude dans le groupe, visiblement déjà au bout de leur vie en ce début de tournée, la quatre ou cinquième depuis la sortie de Blue Rev déjà… (cf. la musique indie en 2024 : ventes déclinantes, tournées incessantes). Hormis quelques petits efforts de Molly peu de sourires en direction de la fosse donc, sans grande rupture avec la tradition cela dit : Alvvays et Molly Rankin ne sont pas spécialement connus pour leurs petits intermèdes comiques ou moments "confession", loin de là... C'est un groupe qui joue de la musique, principalement. No bullshit.

Ambiance légèrement plus détente à Paris donc, où comme en Grande-Bretagne la petite bande entre d’abord en scène sur le son de "Is This Music?" des Teenage Fanclub (mythique), mais sans Molly… Elle déboule finalement quelques secondes plus tard, sans gesticulation particulière mais bien seule, preuve qu’Alvvays est un projet collectif certes, mais que l’aura de Molly Rankin avec sa dégaine d’ado skater canadienne et ses compos déjà légendaires transcendent tout cela et personne ne s’y trompe. Génération frontwoman. « Salut » dit-elle sobrement dans un français impeccable, et avec un petit sourire (!), puis « so we’re gonna play 55 songs ». C’est l’humour qu’on aime.

Vue de Molly Rankin et son t-shirt Degas

Autre plus de cette étape parisienne : le superbe t-shirt gris/rouge « Degas / Musée des Beaux-Arts d’Ottawa » qu’elle arbore ce soir… Élégance simple mais innée, atypique mais classique. Rien de cela à Londres hélas, où la foule dut se contenter d’un sweat rouge à manches longues. C’était oublier que le public a besoin d’inspiration, Molly, rayon fashion et au-delà. Il cherche une guide.

Et le concert sinon, accessoirement ? Nulle surprise ni déception de ce côté : Alvvays est un groupe plus que pro maintenant, que trois albums et quantité de tournées aux quatre coins de la planète ont largement rodé au live - et avec un petit répertoire sympathique déjà surtout. Guère plus de trente titres certes, mais dont une bonne vingtaine pourraient réhausser n'importe quelle setlist indie-pop ou rock, avec ce qu'il faut de variation : tubes pop bondissants ("Archie, Marry Me", "Belinda Says"), ballades dream-pop plus méditatives ("Bored In Bristol", "Dreams Tonite"), ou petites déferlantes de guitares dissonantes type shoegaze ("Many Mirrors", "Pharmacist"). Les trois albums sont assez bien représentés les deux soirs, avec à chaque fois le superbe « Easy On Your Own » en intro, et ses premiers lyrics parfaits déclamés par Molly qui se lance au micro tout en martelant mécaniquement le vibrato de sa Fender Jaguar pour plus d’effets : « I dropped out… college education's a dull knife, if you don't believe in the lettered life… » 3 petites minutes à peine, avec léger calme un instant puis explosion finale de guitares crissantes mais la mélodie est là, toujours là, colorant tout. Molly monte dans les aigus, déjà au top.

Autre sommet, prévisible : "Archie, Marry Me" en milieu de set avec son refrain on ne peut plus simple hurlé par toute la foule… Hey, hey ! Marry me Archie… C’est devenu un tube, un hymne, une allégorie. Molly apprécie l'effort de chant dans le public, nous le dit. Les fans sourient, honorés mais globalement muets. Respectueux. Oui : Alvvays à l’Elysée, ce n’est pas une soirée pour pogoter, gueuler et jouer les gros malins. Alvvays, it’s a safe space... Les tubes continuent de défiler après cela, parfois remuants parfois lancinants. "Pomeranian Spinster" est une décharge de joie noise-pop parfaitement atypique, "Atop a Cake" un régal pop tout simple. What's it got to do with you, what's it got to do with me... Molly brave la foule tout en rythme et en ironie, seule sur sa planète. Qui l'en empêcherait ? Kerri et Alec, à gauche et droite de Molly, ne pipent mot quant à eux, concentrés sur leurs claviers et guitares. Alec – vêtu ce soir de la chemise à carreaux bleue à manche courte la moins hype du monde – est comme à son habitude un vrai guitar hero silencieux, à l’exact inverse du prototype. Il y a lui, sa guitare et ses quatre ou cinq pédales, qu’il actionne ou effleure à peine en permanence. Petits solos vifs et énergiques sur "Pharmacist" et "Belinda Says", qui ne durent guère plus de dix secondes mais crissent dans tous les sens. Un esthète.

Derrière eux : Sheridan Riley à la batterie (concentrée aussi), et à la basse une certaine Anna, toute nouvelle entrante après le départ récent d’Abbey Blackwell – et seulement remplaçante temporaire peut-être. Et ai-je mentionné Molly Rankin, guitare rythmique et chant ? Son sens de la mélodie est sans pareil, sa classe non déclarée mais instantanée. Sur l’intro de "Dreams Tonite" à Paris un halo lumineux semble même un instant l’entourer, elle soudain seule dans le noir, sa chevelure blond platine scintillant comme dans le cinéma hollywoodien des années 40… Et tout cela additionné donne le groupe Alvvays mesdames et messieurs, et on ne fait pas grand-chose de mieux aujourd’hui.

Allez-les voir pour la prochaine tournée, si ce n’est pas déjà fait. Ils n'ont pas l'air comme ça mais ils aiment l'Europe. Et nous.

 

 

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