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jeudi 11 décembre 2025

Mes 10 albums de 2025

Par simple ordre alphabétique cette année (no ranking).

 

Bar Italia - Some Like It Hot

UK - Indie-rock, post-punk (Matador Records) 

Pas mal de storytelling "l'album de la maturité" sur cet album qui serait fondamentalement plus rock et fun que les précédents sans qu'on comprenne trop pourquoi... Ça reste du bar italia première période pour moi, tantôt ténébreux tantôt revigorant et rarement inintéressant. La première face est de loin la plus immédiate il me semble, débutant avec un véritable banger ("Fundraiser") et maintenant la tension rock un poil arty tout du long. Face B plus calme, gagnant sans doute à être ré-ré-écoutée. Un groupe toujours spécial à voir en live par ailleurs (cf. ci-dessous).

Lire mon recap de leur live à la Maroquinerie

 


The Cords - The Cords

Ecosse - Indie-pop, jangle-pop (Skep Wax / Slumberland Records)

Un pur produit de la tradition indie-pop à carreaux de Glasgow, cf la longue tradition locale depuis Orange Juice, les Pastels, Belle and Sebastian et compagnie. Les deux (jeunes) sœurs Tedeschi n'enregistrent pas depuis longtemps mais ont décroché les olés de toute la petite scène indie-pop UK et US avec ce premier opus propre et énergique, déjà très maîtrisé, et bien dans la tradition "cute mais grungy sur les bords". "Fabulist" annonce la couleur d'entrée avec sa guitare jangle à toute vitesse, un peu répétitive mais tout de même entêtante, puis le reste suit avec d'autres très bons moments ("You", "Rather Not Say") et d'autres un peu plus dispensables... Affaire à suivre.

Failli les voir à Paris, mais passage au Paris Pop Fest' annulé hélas.

 

Flora Fishbach - Val Synth

France - Electro-pop, pop (Créature)

Retour atypique pour la plus new wave des chanteuses pop françaises : 3 ans après son deuxième LP très attendu (5 ans avaient passé suite au 1er) c'est un disque au format EP étonnant qu'elle nous balance à la face avec changement de labels et de méthodologie à la clé - plus de sorties rapprochées prévues désormais, et donc plus courtes et resserrées. Un album pour une idée, pour un son... Pari réussi avec ce 8 titres résolument électro-pop et long de 25 petites minutes dont 3 instrumentaux : c'est tour à tour contemplatif et furieusement dansant avec 3 gros singles inclus dont le déjà culte "Comme Jean Reno" (avec Jean Reno) et le très court mais sublime "Des Bêtises" (part II). La voix monte très haut, les synths sont partout, claquants ou reluisants et tout va bien pour Flora, toujours à part dans sa catégorie. Un prochain court LP devrait suivre en 2026/2027 alors vivement.

Elle sera au Zénith le 12 mars 2027 (c'est loin)

 


Hatchie - Liquorice

Australie - Dream-pop, indie-pop (Secretly Canadian)

Une jolie surprise de fin d'année. L'Australienne avait déjà 2 albums derrière elle, dont le précédent qui lui avait valu quelques pouces levés, mais vrai montée en puissance sur ce 3ème opus au son dream-pop 90's hyper classique et classieux : impossible de ne pas penser aux Cocteau Twins sur des titres comme "Carousel" ou "Anchor" avec cette guitare complètement distordue et néanmoins si harmonieuse à la Robin Guthrie (c'est une influence revendiquée d'ailleurs). Harriette Pilbeam n'a pas la voix d'Elizabath Frazer évidemment (qui l'a ?) mais ça ne l'empêche pas de nous offrir un très chouette album pour cet hiver 2025-2026, avec des tas d'effets sonores et quelques envolées plus pop à la clé ("Only One Laughing", "Stuck").

  

 

Horsegirl - Phonetics

US - Indie-pop, indie-rock (Matador Records)

Un disque qui s'affine avec le temps. Le trio de Chicago était plus catégorisé post-punk à la base mais prend des accents plus indie-pop et vintage avec ce second LP, produit par la très demandée Cate Le Bon. C'est plus calme, lent, introspectif, voire parfois répétitif mais aussi étrangement punchy comme sur les singles "2468" et "Switch Over", remarquables de (fausse) simplicité. Un peu sombre aussi, et réminiscent de vieux groupes un peu oubliés comme les Raincoats, qui n'ont pas vendu beaucoup de disques mais continent d'inspirer des tas de jeunes musiciennes peu inspirées par les tendances actuelles... Tout un programme bien résumé dans l'ultime "I Can't Stand To See You", plein de tadadas, de guitares crispées et de regrets (oh oh oh).

Vues au Petit Bain en juin, quelques vidéos à voir sur ma chaine live 

 

Hotline TNT - Raspberry Moon

US - Indie-rock, shoegaze (Third Man) 

Si Hotline TNT joue toujours très fort en live (cf. leur dernier attentat sonore au Point Éphémère), leurs productions studios sont un poil plus mesurées et laissent poindre la jolie petite veine pop qui se cache derrière leurs grosses guitares grondantes : c'était déjà le cas avec l'entrée épique de leur précédent album (Cartwheel), ça l'est encore davantage peut-être sur ce troisième LP alternant efficacement refrains pop et murs de guitare. Dès l'entame ("Was I Wrong?") on est d'abord baigné dans une mer de guitares un peu amères avant d'émerger par surprise une grosse minute plus tard, réveillé la voix soudain plaintive en mode cri du cœur de Will Anderson... C'est mélodique et rythmique (cf le très bon "Candle" aussi) et Will et co s'offrent même un petit moment de gospel hippie sur Julia's War, en mode la la la... Mais les guitares re-déboulent ensuite, rassurez-vous.

 

Molly Nilsson - Amateur

Suède - Synth-pop, new wave (Dark Skies Association) 

La plus berlinoise des Suédoises - elle est installée sur les bords de la Spree depuis 2008 - a déjà un paquet d'albums derrière elle mais ne faiblit toujours pas, aidée en cela par son protocole habituel (pas de label, pas de musiciens, juste elle et ses machines dans sa chambre à Berlin). Il n'y a pas des tonnes de variations sur cet album, et sa voix retouchée/étouffée est presqu'un peu frustrante à la longue (montre toi vraiment Molly!) mais c'est aussi le charme de la méthode Molly Nilsson... de la bonne synth-pop do-it-yourself mélancolique cachant derrière la boîte à rythmes une pelletée de lyrics gauchistes crypto-communistes et de couplets désenchantés sur la marchandisation du monde, de Berlin et le prix toujours plus grand à payer pour rester libre, totalement libre... C'est beau et effrayant à la fois, comme une rave enfiévrée dans un sous-sol en béton armé qui pourrait être la dernière de sa vie et de tous les temps - et pourtant sa musique est douce, si douce. Contradiction éternelle.

 

 

Rolly Derby - When the Night Comes

Allemagne - Dream-pop (Dark Skies Association) 

Autre douceur, plus classique celle-là, mais venant d'outre Rhin encore : Roller Derby, un charmant duo dream-pop d'Hambourg qui touche la bonne note d'entrée avec ce premier LP. Ça n'est pas hyper original ni aventureux mais l'opus compte assez de bonnes compos et de guitares délicatement planantes pour vous retenir jusqu'à la fin si le genre dream-pop vous intéresse un minimum... Avec une belle voix au micro et quelques vraie jolies tracks qui pourraient contenter des groupes plus capés ("Last Night", "Silver Jet", "In Spring").

Entr'aperçus au Supersonic il y quelques mois (inconnus à l'époque) 

 

 

Sally Shapiro - Ready To Live A Lie

Suède - Synth-pop (Italians Do It Better) 

Encore un groupe associé à l'Allemagne pour des raisons purement personnelles (beaucoup écoutés à Berlin, un été). Duo suédois au sang chaud (disco) et à la voix si cristalline, protégés du très cinématographique label US Italians Do It Better (spécialisés dans l'italo-disco et la synth-wave bien vaporeuse). La première face est une petite merveille, avec quelques singles qui dataient déjà certes : le très entrainant "Hard To Love" avec son refrain hyper euphorisant so 80's (merci le vocoder), le plus lyrique "Purple Colored Sky" ou la reprise du classique "Rent" des Pet Shop Boys (ça fonctionne). La suite est un peu plus posée et  introspective mais le charme ne passe pas, jusqu'au très délicat "Rain" avec cette petite voix blessée qui s'efface lentement derrière les gouttes... Les amours ratés font les plus beaux albums.

 


The Tubs - Cotton Crown

Galles - Jangle-pop, indie-rock (Trouble in Mind ) 

Un album un peu chargé pour finir, servant largement d’exécutoire à son leader Owen Williams apparemment pris entre troubles mentaux mineurs (narcissisme, cf la chanson du même titre) et vrai deuil (une mère romancière et chanteuse folk suicidée à 60 ans, sans préavis). Et pourtant la musique des Tubs est un composé plutôt gai à la base, et spontané, du genre jangle-pop toutes guitares dehors avec jolis refrains au milieu et pintes de bière à volonté après (je le sais, c'est écrit sur leur t-shirt : "I had a beer with... The Tubs"). Les Britanniques types donc - Gallois ici -, génétiquement faits pour la mélodie et le malheur tout à la fois. Album court, désuet, désolé, un peu power-pop 60's sur les bords avec mentions pour "Chain Reaction" et l'étonnant "One More Day" (tentative de rap).

Vus il y a pas longtemps au Petit Bain 


mercredi 29 octobre 2025

bar italia : no show mais rock quand même

bar italia le 28/10/25, photo non contractuelle

Mini évènement hier sur les hauteurs de Ménilmontant : Bar Italia (nom tout en minuscules normalement) est en tournée d’automne à la Maroquinerie, et c’est une surprise car le trio rock le plus cool et mutique du moment a les épaules pour la taille d’au-dessus désormais (Cigale en 2024, Élysée Montmartre en février prochain). Pourquoi ce choix osé en termes de revenus issus de la billetterie alors ? Choix artistique ou volonté de chiller ? Pour savoir il suffirait de leur demander bien sûr, mais ça… Bar Italia ne parle pas.

Rarement groupe aura reçu autant de considération du public en donnant si peu, d’un point de vue purement verbal. Sur scène le dispositif du trio londonien (quintet en live) est assez simple : jouer ses morceaux, se taire, puis s’en aller. Bonsoir, merci. La presse spécialisée avait pourtant fait état d’un soi-disant virage « rock et fun » de la petite bande de South London via leur dernier album (Some Like It Hot) et c’est vrai que celui-ci démarre fort avec le très jouissif et régressif "Fundraiser" mais rayon présence scénique la métamorphose est peu claire... Jauge toujours proche de zéro pour les sourires, pas mieux pour les adresses au public. No banter, no joy ou presque.

Un petit bonus à Jezmi Tarik Fehmi tout de même, pas plus loquace que les autres mais qui semble positivement s’amuser sur sa guitare et ça tombe bien, c’est notre préféré avec sa tignasse bouclée, ses lunettes et ses faux airs d’étudiant en lettres slash poète raté fan de Yeats. Nina Cristante sait mettre le feu au micro quant à elle, mais rentre dans son personnage de mannequin mutique dès que les guitares se taisent. Là sans être là. Pas d’ambiguïté avec l’ami Sam Fenton en revanche, qui ne desserrera pas la mâchoire de la soirée. Tant pis, ou tant mieux. On est là pour la musique.

De ce côté-là la performance était au rendez-vous, globalement. Trois temps au programme : départ de feu avec le fameux "Fundraiser" et de premiers petits pogos au milieu, suivi de quelques morceaux aussi punchy avant un long intermède plus posé, balades post-punk lancinantes au programme, éventuellement un peu enhardies de quelques guitares finales ("Jelsy", second album). Puis c’est le punk de post-punk qui reprend l’ascendant, pour une dernière partie éprouvante physiquement côté fosse : ça pogote gentiment de gauche à droite, ça bouge, ça braille, ça lève les bras vers Nina et on bien content de voir ça d’en haut parce que c’est beau un pogo, pour les autres. Sur scène Jezmi est au top de sa life sur sa guitare, écrasant les cordes penché sur le métal, et Nina remplit le rôle qui est le sien : harangueuse de foule, danseuse de la mort, joueuse. La batterie est très impliquée, aussi.

"Punkt" (premier album) est un sommet, sans surprises. C’est un hit, à leur échelle. La petite foule est hystérique pour certains, aux anges pour d’autres, Nina fend presque le public et la question de savoir si Bar Italia la joue mystérieux ou déteste juste les relations publiques n’est plus un sujet. Ils sont là et c’est un résultat en soi. Il y aura même un rappel, de trois titres. Ça n’est pas très bar italia ça, mais bon… On prend.

Fin de soirée. Quelques temps plus tard on croise Jezmi et Sam en train de ranger le matos dans le van : « fun gig » lâche-t-on, sans trop y croire. Sam ne tique pas. Jezmi hésite lui et tourne finalement la tête, une demi seconde : « thank you so much ». Sans passion, mais sans agressivité non plus. C’est pro. On vient de vivre le maximum de l’expérience sociale bar italia, sans nul doute. 

 


Plus de vidéos sur ma chaine YouTube

vendredi 19 septembre 2025

Clap Your Hands Say Yeah : revoir un ami

 

Revoir Clap Your Hands Say Yeah, 15 ans après, c’est un peu comme revoir ce très bon ami d’université que vous avez un peu perdu de vue depuis qu’il a rencontré quelqu’un, eu deux enfants et est parti s’installer à Bordeaux pour le boulot… Vous ne connaissez pas grand-chose de sa vie aujourd’hui, mais les souvenirs subsistent.

Pour Alec Ounsworth, leader de CYHSY, c’est un peu pareil : hier en traversant Paris à vélo pour rejoindre la Gaîté Lyrique me revenaient des flashs de 2010 et de ses environs – avoir moins de 30 ans, écouter sa musique en MP3 sur iPod, télécharger sur eMule, habiter à Montmartre dans un rez de chaussée bien placé mais sombre comme un monastère, découvrir peu à peu Paris et la musique indie, entendre parler de nouveaux groupes je ne sais même plus comment, trouver génial le nom Clap Your Hands Say Yeah et leur musique aussi, drôle de mélange de gros rock noisy et de musique de carnaval, écouter ça en boucle dans le métro, dans la rue, dans les salles d’attente, trouver que la première chanson de Some Loud Thunder sonne bizarre (peut-être un problème de fichier?), l’adorer finalement, faire tourner le disque solo d’Alec non stop aussi (oh my my, obscure queen bee…), avoir trouvé son nouveau groupe fétiche en fait, peut-être, et puis finalement aller les voir un soir à la Maroquinerie en 2011 et… pas de souvenirs ou presque. Étrange.

Et puis 15 ans. Autres groupes, autres intérêts, autres adresses. Trois albums sortis mais pas écoutés, ou presque. Chacun fait sa vie.

Et puis jeudi, à la Gaité. Alec Ounsworth n’a pas changé. Casquette plate à la Bob Dylan visée sur sa tignasse bouclée, look de hobo débraillé, voix haut perchée, il est toujours l’incarnation de cette Amérique post-hippie un peu marginale qui semble toujours prête à s’éteindre mais ne disparait jamais totalement… Pour l’instant. Adieu Robert Redfort, adieu le Washington Post. Alec, quant à lui, a détesté à peu près tous les gouvernements US depuis qu’il est né nous confie-t-il, et la série n’est pas prête de s’arrêter. Fatigue. Soutien à la manif à Paris tout de même, parce qu’il faut bien. Les années passent et rien ne s’arrange.

Le concert s’ouvrira sur une surprise, lui : "Some Loud Thunder", la fameuse ouverture noisy de leur second album (alors que c’est les 20 ans du premier que l’on fête ce soir, ndlr). Une version assez peu reconnaissable d’abord, puis entrainante. Did you wonder... Gros flash de nostalgie. Le métro en 2010, la rue André Del Sarte, tout ça à la fois. Et puis le set attendu commence.

Pas de déception, ni de grosse surprise. Les classiques sont là, en nombre réconfortant, et bien exécutés dans l’ensemble même si le son est parfois aléatoire, aux vocals notamment (l’inconvénient d’être tout devant). On n’entend pas extrêmement bien Alec sur le mythique "Let The Cool Goddess Rust Away" en ouverture mais ça n’est pas très grave, au fond… Les parties de guitare sont fortes et pêchues elles, vivifiantes. Rajeunissantes ? Si seulement. Les moments forts attendus s’enchainent, du petit riff espiègle de "Over andOver Again" au gros country-rock qui tâche de « The Skin of my Yellow Country Teeth » (ci-dessous). Alec parle pas mal entre les morceaux, il a l’air de se sentir bien ici, à Paris. C’est ce qu’il dit. Je filme "Is This Home On Ice", un titre écouté 3000 fois à l’époque avec sa fin hypnotisante. J’aurai une trace, cette fois.

L’ambiance est joyeuse, la soirée belle, l’album anniversaire se finit mais le set se prolonge avec d’autres titres, évidemment. 38 minutes c’eut été un peu court. Alec parle encore et vient tout près du public pour "Satan Said Dance". « Satan, Satan Satan… » implore-t-il le micro tendu, et le public suit. Said Dance !!! C’est fini ou presque maintenant, et je ne sais toujours pas s’il est bon d’être nostalgique ou pas. Les vieux amis est-ce mieux en souvenir ou en chair et en os ?

Je me déciderai demain.