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mercredi 29 octobre 2025

bar italia : no show mais rock quand même

bar italia le 28/10/25, photo non contractuelle

Mini évènement hier sur les hauteurs de Ménilmontant : Bar Italia (nom tout en minuscules normalement) est en tournée d’automne à la Maroquinerie, et c’est une surprise car le trio rock le plus cool et mutique du moment a les épaules pour la taille d’au-dessus désormais (Cigale en 2024, Élysée Montmartre en février prochain). Pourquoi ce choix osé en termes de revenus issus de la billetterie alors ? Choix artistique ou volonté de chiller ? Pour savoir il suffirait de leur demander bien sûr, mais ça… Bar Italia ne parle pas.

Rarement groupe aura reçu autant de considération du public en donnant si peu, d’un point de vue purement verbal. Sur scène le dispositif du trio londonien (quintet en live) est assez simple : jouer ses morceaux, se taire, puis s’en aller. Bonsoir, merci. La presse spécialisée avait pourtant fait état d’un soi-disant virage « rock et fun » de la petite bande de South London via leur dernier album (Some Like It Hot) et c’est vrai que celui-ci démarre fort avec le très jouissif et régressif "Fundraiser" mais rayon présence scénique la métamorphose est peu claire... Jauge toujours proche de zéro pour les sourires, pas mieux pour les adresses au public. No banter, no joy ou presque.

Un petit bonus à Jezmi Tarik Fehmi tout de même, pas plus loquace que les autres mais qui semble positivement s’amuser sur sa guitare et ça tombe bien, c’est notre préféré avec sa tignasse bouclée, ses lunettes et ses faux airs d’étudiant en lettres slash poète raté fan de Yeats. Nina Cristante sait mettre le feu au micro quant à elle, mais rentre dans son personnage de mannequin mutique dès que les guitares se taisent. Là sans être là. Pas d’ambiguïté avec l’ami Sam Fenton en revanche, qui ne desserrera pas la mâchoire de la soirée. Tant pis, ou tant mieux. On est là pour la musique.

De ce côté-là la performance était au rendez-vous, globalement. Trois temps au programme : départ de feu avec le fameux "Fundraiser" et de premiers petits pogos au milieu, suivi de quelques morceaux aussi punchy avant un long intermède plus posé, balades post-punk lancinantes au programme, éventuellement un peu enhardies de quelques guitares finales ("Jelsy", second album). Puis c’est le punk de post-punk qui reprend l’ascendant, pour une dernière partie éprouvante physiquement côté fosse : ça pogote gentiment de gauche à droite, ça bouge, ça braille, ça lève les bras vers Nina et on bien content de voir ça d’en haut parce que c’est beau un pogo, pour les autres. Sur scène Jezmi est au top de sa life sur sa guitare, écrasant les cordes penché sur le métal, et Nina remplit le rôle qui est le sien : harangueuse de foule, danseuse de la mort, joueuse. La batterie est très impliquée, aussi.

"Punkt" (premier album) est un sommet, sans surprises. C’est un hit, à leur échelle. La petite foule est hystérique pour certains, aux anges pour d’autres, Nina fend presque le public et la question de savoir si Bar Italia la joue mystérieux ou déteste juste les relations publiques n’est plus un sujet. Ils sont là et c’est un résultat en soi. Il y aura même un rappel, de trois titres. Ça n’est pas très bar italia ça, mais bon… On prend.

Fin de soirée. Quelques temps plus tard on croise Jezmi et Sam en train de ranger le matos dans le van : « fun gig » lâche-t-on, sans trop y croire. Sam ne tique pas. Jezmi hésite lui et tourne finalement la tête, une demi seconde : « thank you so much ». Sans passion, mais sans agressivité non plus. C’est pro. On vient de vivre le maximum de l’expérience sociale bar italia, sans nul doute. 

 


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vendredi 19 septembre 2025

Clap Your Hands Say Yeah : revoir un ami

 

Revoir Clap Your Hands Say Yeah, 15 ans après, c’est un peu comme revoir ce très bon ami d’université que vous avez un peu perdu de vue depuis qu’il a rencontré quelqu’un, eu deux enfants et est parti s’installer à Bordeaux pour le boulot… Vous ne connaissez pas grand-chose de sa vie aujourd’hui, mais les souvenirs subsistent.

Pour Alec Ounsworth, leader de CYHSY, c’est un peu pareil : hier en traversant Paris à vélo pour rejoindre la Gaîté Lyrique me revenaient des flashs de 2010 et de ses environs – avoir moins de 30 ans, écouter sa musique en MP3 sur iPod, télécharger sur eMule, habiter à Montmartre dans un rez de chaussée bien placé mais sombre comme un monastère, découvrir peu à peu Paris et la musique indie, entendre parler de nouveaux groupes je ne sais même plus comment, trouver génial le nom Clap Your Hands Say Yeah et leur musique aussi, drôle de mélange de gros rock noisy et de musique de carnaval, écouter ça en boucle dans le métro, dans la rue, dans les salles d’attente, trouver que la première chanson de Some Loud Thunder sonne bizarre (peut-être un problème de fichier?), l’adorer finalement, faire tourner le disque solo d’Alec non stop aussi (oh my my, obscure queen bee…), avoir trouvé son nouveau groupe fétiche en fait, peut-être, et puis finalement aller les voir un soir à la Maroquinerie en 2011 et… pas de souvenirs ou presque. Étrange.

Et puis 15 ans. Autres groupes, autres intérêts, autres adresses. Trois albums sortis mais pas écoutés, ou presque. Chacun fait sa vie.

Et puis jeudi, à la Gaité. Alec Ounsworth n’a pas changé. Casquette plate à la Bob Dylan visée sur sa tignasse bouclée, look de hobo débraillé, voix haut perchée, il est toujours l’incarnation de cette Amérique post-hippie un peu marginale qui semble toujours prête à s’éteindre mais ne disparait jamais totalement… Pour l’instant. Adieu Robert Redfort, adieu le Washington Post. Alec, quant à lui, a détesté à peu près tous les gouvernements US depuis qu’il est né nous confie-t-il, et la série n’est pas prête de s’arrêter. Fatigue. Soutien à la manif à Paris tout de même, parce qu’il faut bien. Les années passent et rien ne s’arrange.

Le concert s’ouvrira sur une surprise, lui : "Some Loud Thunder", la fameuse ouverture noisy de leur second album (alors que c’est les 20 ans du premier que l’on fête ce soir, ndlr). Une version assez peu reconnaissable d’abord, puis entrainante. Did you wonder... Gros flash de nostalgie. Le métro en 2010, la rue André Del Sarte, tout ça à la fois. Et puis le set attendu commence.

Pas de déception, ni de grosse surprise. Les classiques sont là, en nombre réconfortant, et bien exécutés dans l’ensemble même si le son est parfois aléatoire, aux vocals notamment (l’inconvénient d’être tout devant). On n’entend pas extrêmement bien Alec sur le mythique "Let The Cool Goddess Rust Away" en ouverture mais ça n’est pas très grave, au fond… Les parties de guitare sont fortes et pêchues elles, vivifiantes. Rajeunissantes ? Si seulement. Les moments forts attendus s’enchainent, du petit riff espiègle de "Over andOver Again" au gros country-rock qui tâche de « The Skin of my Yellow Country Teeth » (ci-dessous). Alec parle pas mal entre les morceaux, il a l’air de se sentir bien ici, à Paris. C’est ce qu’il dit. Je filme "Is This Home On Ice", un titre écouté 3000 fois à l’époque avec sa fin hypnotisante. J’aurai une trace, cette fois.

L’ambiance est joyeuse, la soirée belle, l’album anniversaire se finit mais le set se prolonge avec d’autres titres, évidemment. 38 minutes c’eut été un peu court. Alec parle encore et vient tout près du public pour "Satan Said Dance". « Satan, Satan Satan… » implore-t-il le micro tendu, et le public suit. Said Dance !!! C’est fini ou presque maintenant, et je ne sais toujours pas s’il est bon d’être nostalgique ou pas. Les vieux amis est-ce mieux en souvenir ou en chair et en os ?

Je me déciderai demain.



vendredi 5 septembre 2025

Une rentrée avec Ruth Radelet et Ducks Ltd

 

Rentrée supersonique à Bastille… Pour parer à tout blues de fin d’été la multinationale du même nom nous proposait une double affiche un peu perverse ce jeudi 4 septembre, quatrième jour du calendrier post-vacances : Ruth Radelet au Supersonic Records d’abord (21 heures pétantes), puis la petite bande de Ducks Ltd à cinquante mètres là une heure plus tard, côté Club… Rendez-vous pris, et pari tenu ! Il allait falloir être efficace.

Petite émotion de découvrir Ruth Radelet d’abord, l’ex chanteuse et claviériste/guitariste de Chromatics, classieux groupe d’électro ayant marqué les années 2010 de leurs longues nappes de synthé low-tempo si planantes parfois agitées de quelques guitares lancinantes. Italians Do It Better disait leur label, mais c’était bien sur la côte Ouest des États-Unis que ça se passait, tout au Nord (Portland), et Ruth Radelet en était un élément incontournable avec sa voix cristalline et son look de starlette déchue des années 50… Un groupe au son et à l’image éminemment cinématographiques, assez apprécié des bandes-son ciné et TV (le fameux Drive de Nicolas Winding Refn notamment, qui a aussi révélé Kavinski et son "Nightcall").

Chromatics a pris fin en 2021 hélas. C’est en solo que la grande dame opère désormais donc, mais qu’importe le public du Supersonic Records voulait voir ça de ses propres yeux, et plus sur petit écran. Pas de désillusion : Ruth Radelet prend excellemment bien la lumière, comme avant, et son cocktail de dream-pop un peu synthé est très plaisant à découvrir en live, plus encore qu’en version studio peut-être : voix bien posée, rythmique bien placée (il y a batterie, basse et 2 guitares ce soir), le groupe fait ce qu’il faut pour donner à ses quelques compos la gravité et l’épaisseur sonore qu’il faut, oscillant entre le contemplatif et le plus shoegazy, guitares de sortie. "Crimes" est le petit joyau de l’ensemble avec son refrain faussement naïf (is it easy to start over, is it easy to play the game...) et son solo de guitare planant et plaintif à l’envie. Mention également pour "Sometimes" et "The Veil", dans la même veine. Et puis deux titres de Chromatics pour finir – le magnifique "Shadow" – avant de prendre congé avec une reprise du vieux classique américain "Blue Velvet", si cinématographique. On ne se refait pas.

Petite course vers le Supersonic Club ensuite, et arrivée sur les premières notes de "Train Full of Gasoline" ! Un titre enlevé et parfait pour lancer le show Ducks Ltd (Canada, jangle-pop), soit 45 minutes de guitares aiguës en folie. Autre salle, autre ambiance… On avait déjà vu les animaux au festival Block Party en 2024, et déjà à l’époque les 4 loustics nous avaient mis un bon coup sur la tête : plutôt sages et propres sur eux en studio (et on aime aussi, surtout leur dernier album Harm’s Way), les deux potes de Toronto se transforment sur scène avec leurs deux complices de tournée (basse et batterie) comme le Supersonic a pu le constater ce jeudi soir… Il fallait être près.  D’abord un peu loin (logique au vu de l’horaire d’arrivée), je fends donc la foule après quelques minutes pour profiter de l’énergie communicative du quatuor. Ça jangle fort à la guitare, ça joue vite, très vite, pied au plancher ou presque et on ne fait parfois même pas de pause entre les morceaux ! Petite euphorie sur "Hollowed Out", qui part dans tous les sens. Les guitares carillonnent, carillonnent, et ça bondit à la basse. Evan Lewis (chant) jouit du moment, sourire jusqu’aux oreilles entre deux bastons à la guitare. Quelle fête ! Ça se calme un moment sur "Heavy Bag", dernière piste de Harm’s Way, puis replongée brutale dans le chaos des guitares avec "The Main Thing". Ça sautille, ça sautille, des deux côtés de la scène… Encore quelques titres comme ça, dont l’excellent "18 Cigarettes" et pour conclure une cover de The Jesus & Mary Chain ("Head On") et effectivement, c’était toute la soirée la tête la première ! Set to explode, like a train full of gasoline…

Quelle rentrée.

 

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